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Le récit émouvant d’une migrante nigériane de 16 ans désabusée
Date de publication : 31-07-2022
« Je me nomme No, j’ai 16 ans et je suis originaire du Nigéria. Je suis issue d’une famille modeste et j’ai passé mon Baccalauréat cette année. Il y a deux ans un ami a proposé à mes parents de m’emmener en Europe pour continuer des études supérieures, travailler et gagner de l’argent afin de venir en aide à mes parents. Cette proposition était la bienvenue pour moi car je ne voyais pas d’autres façons de pouvoir leur venir en aide. J’ai donc décidé, mon Bac en poche, de prendre la route le 29 mai 2022." Dans le cadre de la Journée mondiale contre la traite des êtres humains (30 juillet), le médecin superviseur terrain Projet-Migrations pour la région du Sahel a recueilli ce témoignage
L’ami en question est venu avec moi et nous sommes passés en bus par le Bénin, le Ghana, le Togo et nous sommes arrivées au Burkina Faso début juin. Tout au long de ce périple, j’arrivais à peine à avoir de quoi manger, le découragement avait commencé à s’installer en moi mais l’espoir d’avoir une vie meilleure en Europe m’a fait tenir.
Arrivée au Burkina j’ai compris que j’avais été trahie et qu’il n’avait jamais été question d’aller jusqu’en Europe. Celui qui se faisait passer pour un ami m’avait vendu à un réseau de proxénètes. Les membres de ce réseau m’ont obligée à me prostituer pour avoir de quoi vivre. Aujourd’hui je suis en train de soigner une maladie sexuellement transmissible (MST) que j’ai contractée lors de l’un de ces rapports forcés. Par chance, le samedi 02 juillet mon calvaire a pris fin, car certains membres de ce réseau de proxénètes ne se sont pas entendus quant au partage de l’argent qu’ils gagnaient grâce à moi. Ils se sont par conséquent rendus à la gendarmerie de Dori pour régler leur litige ignorant qu’ils pratiquaient une activité illégale.
Le soutien providentiel d’un projet de la Croix-Rouge
"Les gendarmes sont venus me récupérer et ont contacté la Direction provinciale de l’action sociale à Dori, qui m’a prise en charge. L’action sociale m’a ensuite orienté vers le projet « Assistance et protection des migrants les plus vulnérables en Afrique de l’Ouest », mis en œuvre par la Croix Rouge Burkinabè, en collaboration avec la Croix Rouge espagnole et luxembourgeoise et financé par l’Union européenne. Ce projet a pris en charge mes frais de santé, m’a apporté un appui psychologique et m’a permis de reprendre des forces en mettant à ma disposition un hébergement sûr et un service de restauration complète. J’ai également reçu des articles d’hygiène et des conseils sur ma protection. Je remercie la gendarmerie de m’avoir libérée des mains de ces hommes sans cœur, et l’Action sociale ainsi que la Croix-Rouge de leur soutien. Je ne saurais jamais si mon ami avait fomenté tout ce qui m’est arrivé mais je suis très en colère contre lui et contre tout ce qui m’est arrivé, je ne méritais vraiment pas ça. Je ne parle pas la langue du Burkina, je me sens seule, isolée comme dans une prison à ciel ouvert. Mon désir le plus profond est de retourner dans mon pays auprès de mes parents. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a promis de m’aider à retourner chez moi. J’attends le jour de mon retour avec impatience. Les services mis en place dans le cadre du projet Migration-EUTF au Sahel, m’ont permis de me sentir à nouveau en sécurité, de recouvrir la santé ainsi que de retrouver l’espoir que dans ce monde il existe toujours de bonnes personnes.
Voici donc le récit de mon histoire que je ne souhaiterais même pas à mon pire ennemi ».
Témoignage recueilli par Mr Nana, médecin superviseur terrain Projet-Migrations pour la région du Sahel
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